Journal de Jia Huadeng (2)
Les cheveux blancs de Papa
Le 4e jour du 6e mois, les Miao célèbrent la « fête du riz nouveau ». Cette année, Papa est revenu de son lointain travail pour passer la fête avec nous. Rentrée aussi chez moi, je ne vois pas Papa, je ne vois que Maman et Grand-mère. Je me mets à manger avec appétit, et juste à ce moment-là, Papa apparaît à la porte d’entrée, une cage à oiseau à la main. « Huadeng, tu es rentrée ! » dit-il joyeusement. Je me tourne vers lui et je sursaute : « Est-ce bien là mon père ? Pourquoi a-t-il tant vieilli ? » me dis-je au fond de moi. Les cheveux de Papa sont devenus tous blancs. Ses yeux se sont beaucoup enfoncés. Il a maigri. Il marche avec difficulté. Mon père se tue au travail loin d’ici pour nous faire vivre sans jamais se plaindre. Ses cheveux blancs, c’est aussi pour nous. Ses yeux cernés enfoncés dans leurs orbites, c’est aussi pour nous. L’année entière loin de son foyer, tout ce qu’il fait c’est pour que nous puissions continuer à vivre.
Maman me dit : « Sais-tu ? Chaque année quand ton père revient passer les fêtes de Nouvel an, il se teint les cheveux en noir juste avant de revenir au village. Cela lui donne un air plus jeune. » Je n’aurais jamais pensé qu’il puisse se teindre les cheveux pour paraître plus jeune. Cette fois-ci, pourquoi ne l’a-t-il pas fait ? D’abord j’ai pensé que c’était par coquetterie qu’il teignait ses cheveux, mais ce n’était pas cela. Il voulait garder un état d’esprit jeune pour continuer à travailler dur, pour que nous ses enfants puissions continuer à étudier dans de bonnes conditions. C’est pour nous que ses cheveux sont devenus blancs. Bien que Papa a vieilli, son sourire n’a pas changé, il a encore l’air jeune.
Journal de Jia Huadeng, 9 juin 2008